Un froid et épais manteau d'hiver avait ce matin là recouvert les Highlands d'Ecosse, ainsi que le Parc et les hauteurs de Poudlard, désormais parés d'un duvet cristallisé étincelant de blancheur. Des corbeaux jonglaient entre les branches des arbres décharnés dépouillés de leurs feuilles, étonné par la neige qui avait désormais pris possession des lieux, les croassements résonnant dans l'air pur et frais d'une magnifique journée de Décembre, le soleil brillant de ses milles feux dans le ciel dégagé qui surplombait la plus fameuse des Ecoles Magiques.
Arthur, pour une raison qu'il ignorait, s'était réveillé très tôt, alors que le soleil ne se levait pas encore à l'horizon. Seul dans son petit dortoir, il avait pris tout son temps pour se préparer convenablement, muni d'une épaisse cape noire et d'une sublime écharpe aux couleurs de sa Maison. Légèrement mélancolique, il ne regrettait cependant le choix d'être resté à Poudlard pendant les vacances. A présent, c'était un peu sa deuxième maison, un lieu qui lui appartenait, malgré qu'il soit d'ascendance Moldue. Il sortit de la Salle Commune alors que tout était encore silencieux et endormi, troublant seulement cela par le bruit de ses pas sur les dalles et quelques bâillements intempestifs. La faim lui tiraillant l'estomac, il prit le parti de se diriger vers la Grande Salle, ne doutant pas d'y trouver quelque chose à manger.
Après s'être restauré grâce à un petit déjeuner typiquement Anglais, à base d’œufs, de patates et d'haricots à la sauce tomate ainsi que de plusieurs verres de Jus de Citrouille, il sortit finalement dans le Parc immaculé, ayant traîné longtemps dans la Grande Salle qui s'était peu à peu remplie. Ses pas crissaient bruyamment dans la neige qui recouvrait les habituelles pelouses parfaitement coupées de Poudlard. Voulant prendre soin du paysage et le laisser intact, il sortit sa baguette en utilisant le Sortilège d'Oblitération dans son sillage, la neige prenant de nouveau ses droits sur les trous laissés par son passage.
D'humeur farceuse, il trouva finalement un petit bosquet intact, derrière lequel il se cacha. En prévision du moment ou d'autres élèves passeraient devant lui, il ramassa la neige éparse, et entreprit de la malaxer dans ses gants ocres pour en faire des boules. Après en avoir créer un tas d'une taille respectable, il s'arrêta. Arthur n'eut cependant pas à attendre longtemps, car un groupe de jeunes magiciens venait dans sa direction, sortant vraisemblablement du château. Posant sa plus belle boule de neige dans la paume ouverte de sa main gauche, il attrapa ensuite sa baguette et pointa de celle ci la boule, dans la direction du groupe qui s'en venait vers lui, prononçant dans un sourire malicieux :
- Waddiwasi Maxima !
Le projectile blanc partit à une vitesse habituellement peu atteinte, fusant vers ses camarades...
Evan s'était levé tard ce jour-là. Certes, il se levait toujours tôt pendant les périodes de cour, mais comme c'était les vacances, il se laissait un peu aller. Plus aucun bruit de ronflement ne se faisait entendre dans le dortoir. Il était seul. Il s'était levé rapidement, s'était habillé avec un sourire puis était rapidement sortis de sa salle commune.
Dehors, les couloirs étaient vides. Seuls bougeaient les peintures pittoresques qui le regardaient passer. Le jeune Evan avait mit du temps à s'y faire. Voir des peintures mouvantes avait été pour lui l'un des pires dépaysement de sa vie. Le monde de la magie était impressionnant, même dans ses aspects les plus banals.
Après avoir marché quelques minutes avoir descendu les escaliers, il était allez dans la grande salle pour manger un repas copieux puis, le sourire aux lèvres, il partit enfin vers les bibliothèques. Comme il n'y avait presque plus personne dans l'école, il avait tout le loisir du monde de consulter tous les livres qu'il souhaitait. Nul pour l'importuner ... Si ce n'était une jeune Serpentard, Alice, et un jeune Poufsouffle, Elliot. Leur rencontre avait été soudaine et innatendu, mais il ne s'en voulait pas de les avoir croisé.
Les deux jeunes gens avaient donnés quelques sourires au jeune Evan qui en avait bien besoin. Les livres, c'est bien; mais les interactions humaines ne se remplacent pas. Ils avaient discutés ainsi, au travers des livres, dans une bibliothèque déserte, quand ils avaient soudainement trouvé qu'il faisait chaud. Hors, l'on pouvait voir par les fenêtres qu'une fine neige tombait du ciel, laissant une buée dans les vitres et annonçant un froid plus qu'attendu. Les jeunes hommes étaient alors descendus et, parlant gaiement des connaissances qu'ils avaient acquis depuis le début de leur première année, passèrent enfin la grande porte qui les séparait de l'extérieur.
Evan, d'habitude calme, se laissait aller à une grande hilarité suite à un commentaire de la jeune serpentard. Son sourire s'effaça rapidement, toutefois, puisqu'il reçu en plein visage une boule de feu -- ou de neige? -- qui le laissa choir sur son postérieur. Il prit son visage dans ses mains, en douleur, puis laissa s'échapper un son fatigué de sa bouche: ses lunettes étaient encore cassées.
Elliot s'était levé tôt ce jour là. Vacances ou pas, il ne fallait pas déroger à sa routine quotidienne, sinon c'était le début du bazar. Pas de laisser-aller. Pendant que ses camarades de Poufsouffle roupillaient encore, il était allé se brosser les dents et se rafraîchir le visage, puis il avait consigné quelques notes dans le petit carnet en cuir qu'il gardait toujours sur lui. Il s'était habillé de son uniforme, impeccable comme toujours. Il portait rarement autre chose, il se sentait bien dedans. Il avait remonté la montre à gousset qui trônait toujours dans la poche droite de son pantalon. C'était un cadeau de sa mère.
Sa mère qui se languissait de le voir. Il l'avait convaincue de le laisser à Poudlard pendant les vacances de Noël parce qu'il s'y était fait des 'amis' (un pieux mensonge) et qu'il avait beaucoup de connaissances à emmagasiner (ça c'était vrai). Il vérifia sa volière : bien entendu, sa mère se vengeait en lui envoyant deux lettres par jour, dans lesquelles elle demandait des détails sur tout, sur le château, sur la nourriture, sur ses 'amis', et puis est-ce que les professeurs étaient gentils, et puis est-ce qu'il avait trouvé un piano, il avait intérêt à continuer de s'exercer, sorcier ou pas sorcier !
Il lut la lettre dite 'du matin' et la rangea, notant qu'il devait y répondre plus tard. Pour Maman, il avait toujours le temps. Puis il alla petit-déjeuner dans cette grande salle qui lui avait fait forte impression à son arrivée, et dont il s'amusait maintenant à chaque bouchée, d'analyser les moindres détails d'un œil d'expert. C'était toujours mieux que de banales conversations : là, il pouvait peut-être apprendre quelque chose. Heureusement, comme il était tôt et que c'était les vacances, il n'y avait quasiment personne, et personne ne le dérangea.
Etape suivante : la bibliothèque. Oui, comme tous les matins. Dans un petit coin tranquille, pour ne pas être dérangé par les chuchotements. A vrai dire, dans ce petit coin, il ne tolérait près de lui que la présence de deux autres première année. Evan Lord et Alice Hamilton étaient aussi calmes et silencieux que lui, la plupart du temps. A force de se croiser à la bibliothèque depuis la rentrée, ils avaient fini par faire cause commune. Bon, ils n'étaient pas parfaits : Evan ne montrait que rarement des émotions, à se demander s'il avait bien un coeur qui battait sous sa poitrine. Elliot n'avait pas encore eu l'occasion de vérifier. Quant à Alice, elle prenait tout le monde de haut, ce qui l'amusait plus qu'autre chose vu la taille de la demoiselle.
Ils s'entendaient. C'était déjà ça. Des trois, Elliot était sans doute le moins bavard, n'intervenant que quand il avait quelque-chose de signifiant à apporter à la conversation, un point de détail sur un sort par exemple, ou sur une plante qu'ils étudiaient en botanique. Sinon, il lisait et écoutait en même temps, ce qui n'était pas toujours facile. Mais il fallait "s'ouvrir aux autres", comme disait Maman.
Elliot serait bien resté à la bibliothèque même s'il faisait chaud. C'était toujours mieux que de se les geler dehors, mais bon, la majorité l'avait emporté et après tout, une pause leur ferait du bien. Ils sortaient donc, direction le parc, la neige, le froid. Tout frissonnant, Elliot tachait de marcher où il y avait le moins de neige possible pour ne pas trop abimer ses chaussures. Peine perdue. A sa droite, Alice dit quelque chose, quelque chose de drôle visiblement, puisqu'Evan se mit à rire.
Et c'est là qu'eut lieu l'incident. Un projectile percuta son camarade Serdaigle si fort qu'il était forcément lancé avec l'aide de la magie. Première constatation. La suite de l'enquête fut rapide : laissant Evan se remettre du choc (ça va, c'était juste une boule de neige), Elliot croisa le regard du fanfaron qui avait ourdi cette sombre attaque en traître. Lorsqu'il reconnut Arthur Elwent (il avait appris les noms de tout le monde), il arqua un sourcil. Le grand dadais semblait très content de lui.
"Tu t'es cru en Première Année, Elwent ?" cria-t-il de sa voix fluette. Puis il eut une moue désolée pour ses camarades. Arthur était un Poufsouffle, comme lui, et, forcé de côtoyer les jaunes depuis maintenant presque quatre mois, il se sentait bizarrement obligé de répondre de leurs actes. Sortant les mains des poches, il darda son regard sur Alice, attendant sa réaction. Vu la frivolité de l'affaire, ce n'était certainement pas lui qui allait choisir la marche à suivre.
Peut-être même qu'il allait rentrer. Ça pouvait vite dégénérer. Mais pouvait-il laisser ses 'connaissances de bibliothèque' seuls face à l'adversité ?
Alice se réveilla tôt, comme à son habitude. De toute façon, elle n’arrivait plus à dormir, son corps réglé comme une horloge lui dictait les heures où il fallait aller dormir ou se lever. Les fêtes ne faisaient pas exception. Enfilant sa robe de sorcier et sa cape, elle s’admira un instant dans le miroir. Depuis quatre mois déjà, elle étudiait dans cet environnement fantastique qui lui faisait découvrir mille et unes merveilles. Lissant le symbole de Serpentard brodé sur sa robe, elle soupira légèrement. Ses camarades ne l’appréciaient pas vraiment, mais ce n’est pas ça qui l’empêcherait d’être la meilleure! Même si elle avait toujours cette Granger dans les pattes qui se prenait pour la reine du monde… C’est avec un regain de détermination qu’elle sortit du dortoir des filles, traversa la salle commune de sa maison et s’engouffra dans le couloir désert en cette période de l’année. Ses parents n’étant pas à la maison de toute façon, elle préférait passer Noël à Poudlard que seule à Liverpool, d’autant plus qu’elle avait amené son chat avec elle.
Après avoir passé prendre un petit-déjeuner léger dans la grande salle, Alice fila directement vers la bibliothèque. Calme, entouré de livres, c’était un de ses endroits préférés dans le château. Comme d’habitude, elle s’assit aux côtés de ses camarades d’études : Evan Lord et Elliot Summers. Ils s’étaient tous retrouvés dans la même section de la bibliothèque, cherchant un coin plus tranquille, et avaient fini par faire connaissance. Au fil des cours, ils s’entraidaient pour faire leurs devoirs et étudier, ce qui plaisait fortement à Alice qui pouvait étaler son savoir tout en apprenant de nouvelles choses. À un certain moment, Rusard apporta du bois pour le feu qui brulait non loin de leur table. Attisant les flammes, la chaleur devint bientôt insupportable, ce qui agaça Alice au plus haut point. Heureusement, Evan suggéra d’aller se promener dehors dans la neige, ce qu’ils firent.
Sa cape frôlant le blanc manteau, la jeune fille inspira un bonne bouffé d’air frais. Emmitouflée dans son foulard vert et argent, sa température commençait enfin à se stabiliser. Tout en parlant des cours auxquels ils participaient tous les trois, étant des premières années, ils laissaient les premières empreintes dans ce champ de sucre glace. À un certain moment, le sujet dériva sur leurs notes et Alice nota que de toute façon, ce serait elle qui aurait le meilleur bulletin. Apparemment, Evan trouva cette affirmation bien hilarante, ce qui irrita la fillette. Elle allait lui envoyer une insulte lorsque celui-ci se retrouva sur le postérieur, de la neige plein le visage. Il ne fallut que quelques secondes à Alice pour comprendre ce qu’il c’était passé : quelqu’un semblait vouloir démarrer une bataille de boules de neige.
- Tu t'es cru en Première Année, Elwent ? Lança Elliot.
Jamais Alice n’avait entendu parlé de ce dernier, mais à entendre la voix de son camarade, ce devait être un Poufsoufle. Sans attendre, la jeune fille se précipita pour amasser de la neige avec ses mains pour former une sphère bien compacte dans sa mitaine verte. De son petit bras, elle lança de toute ses forces le projectile vers le buisson d’où semblait venir l’attaque. Ce dernier s’écrasa sur les branches, ne faisant qu’éclabousser leur agresseur. Fronça les sourcils, elle cria :
Le projectile blanc partit à une vitesse habituellement peu atteinte, fusant vers ses camarades... Malgré les savants calculs qu'Arthur avait effectué avant de faire partir la monstrueuse boule de neige, il devait se rendre à l'évidence : elle était bien trop haute. Après quelques secondes d'une course effrénée, le projectile cristallisé alla s'exploser sur la tête d'un élève, Serdaigle d'après ce que le Poufsouffle avait pu voir de sa cape. La force de l'impact couplé à la surprise fut telle que le garçon perdit son équilibre, tombant lourdement dans la neige se tenant le nez, l'air indigné à la vue de ses lunettes désormais réduites à quelques morceaux de verre, poussant un étrange soupir d'exaspération.
Cependant, malgré la trajectoire mal calculée et le malheur certain du jeune garçon, Arthur était hilare, se dressant de derrière le bosquet, se tenant les côtes tant il riait. Mais alors qu'il avait espéré un peu de compréhension, il fut soudain assaillit par les reproches des camarades de sa cible, l'air furieux ou du moins peu amusés.
-Tu t'es cru en Première Année, Elwent ? fit un jeune Poufsouffle.
- Sort de là, espèce de lâche ! continua une jeune Serpentard à côté.
Il en fallait cependant bien plus pour désarçonner Arthur, et celui ci se lança du petit tertre sur lequel il était caché, suivi de très prés par un petit tas de boules de neige lévitant derrière lui, alors qu'il glissait sur le manteau blanc en se dirigeant vers eux. Faisant mine de s'approcher avec des intentions amicales, voulant jeter un œil au pauvre Serdaigle à terre, il saisit alors avec une rapidité folle une boule de neige voletant derrière lui, et, visant sommairement le Poufsouffle qui l'avait plus tôt invectivé, il la lança de toute ses forces vers son buste. N'attendant même pas un résultat, il se pencha afin de ramasser la poudreuse, bien décidé à continuer son embuscade et briser le silence paisible et frais qui régnait sur Poudlard en cette matinée hivernale.
Ses culottes étaient mouillées. Ses lunettes étaient cassées. Son nez saignait et il voyait embrumé. Le jeune Lord regrettait soudainement d'avoir quitté la bibliothèque. Sa chaleur était suffoquante, mais certainement moins ennuyeuse que cette situation. Il ne s'était pas demandé longtemps ce qui était arrivé. Avec les commentaires de ses camarades d'étude, il avait déduit qu'il avait reçu en pleine figure une boule de neige bien froide et surtout bien compacte.
Il sentait toutefois ses camarades particulièrement ennuyés. Evan Lord n'aimait pas la bagarre, et c'est dans cette ordre d'idée qu'il se leva rapidement. Il se plaça rapidement devant le jeune Poufsouffle Elliot. Il craignait que celui-ci, ayant peut-être le sang plus chaud, n'essai de se battre avec l'aggresseur.
- Laisse tomber, ce n'est pas gr-
Il sentit quelque chose frapper le côté de son visage et s'écrasa de nouveau dans la neige, cette fois la tête première. Cette fois-ci, il avait sentit ses lunettes véritablement cassées et il laissa encore s'échapper un rauque d'ennui et de douleur.
Non non non. Elliot secouait la tête. Ses camarades n'avaient certainement pas choisi les meilleures solutions au dilemme qu'incarnaient Arthur Elwent et ses boules de neige.
Déjà Alice avait choisi de répondre à l'attaque par l'attaque : le meilleur moyen d'envenimer la situation. Arthur était bien plus grand qu'eux, connaissait plus de sorts, et s'il voulait leur mettre la misère il le pouvait très certainement. En même temps, vu l'hilarité de leur adversaire, nul doute que la négociation aurait eu bien des peines à aboutir. Quant à Evan, sans doute plus raisonnable, voilà qu'il s'interposait en jouant le rôle du sage ou du pieux, et ce malgré sa souffrance.
Ce qui devait arriver hélas arriva. Evan ne réussit qu'à s'interposer entre Elliot et la boule de neige, et se prit de plein fouet le projectile qui était destiné au jeune Poufsouffle. De souffle, Elliot en fut coupé. Lui qui pensait que dans cette maison, on se serrait les coudes, on ne s'attaquait pas en traître. C'était vraiment une déception, sans doute la première d'une longue liste. Il sortit immédiatement sa baguette en sorbier de sa poche, fit un moulinet avec son poignet et prononça distinctement, sèchement "Protego !" Voilà qui lui donnerait quelques secondes, à supposer que le bouclier soit bien actif. Bon, il s'était bien entraîné suite au cours du Professeur Quirrell, ça pouvait fonctionner.
Malheureusement, ce n'était pas une solution de long terme. Arthur s'approchait toujours. Evan était à terre et visiblement en souffrance. Nul ne savait encore ce qu'allait faire Alice. Il était temps de prendre les choses en main. "Je suggère un repli stratégique," énonça Elliot d'une voix bien trop fluette pour être professionnelle, tout en saisissant un bras d'Evan pour l'aider à se relever. Il avait un peu de compassion pour le Serdaigle. Après tout, c'était lui, Elliot Summers, qui aurait du se prendre la boule. Il n'avait pas l'habitude qu'on se sacrifie pour le sauver, même involontairement.
Sans attendre, il se mit à courir vers la bibliothèque, entrainant Evan par le bras. Peut-être que son charme du bouclier était assez puissant pour les protéger tous les deux ? "Couvre nous, Alice ! Sois forte !" Ça le chagrinait un peu de sacrifier sa camarade mais sur le moment, il n'avait pas mieux.
Lorsque le Poufsouffle sortit de derrière le buisson, Alice en resta sans voix. C’était vrai qu’Elliot avait prononcé « tu t’es cru en première année », mais jamais Alice n’avait pensé qu’un cinquième année sortirait de sa cachette, suivit par une montagne de boules de neiges déjà bien formée. Avalant sa salive difficilement, la brunette regarda filer une deuxième boule de neige droit ver son camarade Poufsouffle, cette fois. La jeune fille allait s’interposer, sortant sa baquette de séquoia, mais celle-ci était coincée dans l’épaisse cape couvrant ses épaules.
- Laisse tomber, ce n'est pas gr… Commença Evan, les lunettes cassées, en se relevant.
Faisant de son mieux, elle dégagea enfin le bout de bois en regardant, impuissante, le projectile frapper durement le jeune Serdaigle. Celui-ci fut projetté vers l’avant, le visage planté dans la neige, les fesses en l’air, montrant ses pantalons mouillés. Alice se précipita entre ses camarades et le dénommé Elwent, sa baguette levé, prête à intervenir.
- Je suggère un repli stratégique, énonça Elliot.
C’est alors que ce dernier lança un sort de protection, comme le leur avait appris le professeur Quirrell. Une attaque de boule de neige n’étant pas très menaçante, leurs maigres boucliers pouvaient fonctionner. Le première année pris alors Evan et commença à courir vers le château.
- Couvre nous, Alice ! Sois forte ! Lança-t-il par-dessus son épaule.
Alice ne broncha pas, resserrant sa prise sur sa baquette. Que faire? Que faire?
*Réfléchit, réfléchit…* Se dit la jeune fille alors que le Poufsouffle, beaucoup plus grand qu’elle, avançait.
D’un coup, elle pointa sa baguette vers le sol. En faisant un mouvement de va-et-vient, elle énonça :
-Wingardium Leviosa
La neige autour d’Elwent, poudreuse et légère, s’éleva doucement dans les airs. Alice lui fit ensuite faire un large tourbillon autour du cinquième année et la propulsa vers le ciel, créant un rideau aveuglant par les rayons du soleil se reflétant sur les flocons. Une chance qu’elle s’était beaucoup entraînée au sort de lévitation après le cours du Professeur Flitwick! La Serpentard pris alors ses jambes à son coup afin d’aller retrouver ses amis au château.
Non, tout ne se passait pas comme prévu... Il ne s'était déroulé que quelques secondes depuis le début de l’embuscade qu'il avait fomenté dans le Parc recouvert d'un manteau blanc, et déjà les faits s'accéléraient aussi vite que neige qui fond au soleil, prenant une tournure des plus inattendues. La seconde boule de neige qu'il venait de lancer ne s'était non pas écrasée dans le buste du jeune Poufsouffle mais une nouvelle fois dans la figure de ce pauvre Serdaigle apparemment affligé de tout les malheurs. De plus, chose qui avait particulièrement déçu Arthur, le jeune homme qui portait une écharpe aux couleurs de Poufsouffle fuyait maintenant dans un nuage poudreux d'immaculée blancheur.
- Je suggère un repli stratégique, fit le jeune homme en tirant son camarade à terre qui regardait ses lunettes deux fois brisées avec dépit.
Après qu'Elliot ait lancé derrière eux un Sortilège du Bouclier qui ne serait sans doute pas difficile à briser pour Arthur, celui ci partit avec le "blessé", criant à l'adresse de la jeune Serpentard restée là :
-Couvre nous, Alice ! Sois forte ! résonna sa voix dans le Parc vide, les seuls spectateurs de l'altercation étant pour le moment des corbeaux dont les croassement moqueurs retentissaient depuis les nombreux arbres décharnés non loin d'ici.
-Ne partez pas ! s'exclama Arthur tout en avançant, désormais moins hilare, laissant tomber son petit tas consciencieusement fait d'un prompt geste de sa baguette magique.
Il fut cependant stoppé dans sa course par la Serpentard qui se dressait désormais en travers de son chemin, le Poufsouffle profitant de cet instant pour l'observer plus attentivement : elle était petite, de teint pâle, et de longs cheveux bruns tombaient sur sa cape aux doublures vertes. Ses yeux étaient assortis à sa toison puisque bruns aussi, contrastant avec son teint pâle et son visage légèrement joufflu aux lèvres épaisses. C'est alors que la jeune fille sortit sa baguette de l'intérieur de ses poches, visant la neige à ses pieds en prononçant fortement :
-Wingardium Leviosa ! tandis que la neige se levait autour d'Arthur.
Elle traça ensuite de grands cercles dans l'air, tandis que la neige poudreuse et froide entourait le Poufsouffle désappointé, se levant toujours plus haut pour former un tourbillon qui convergeait vers lui, alors que le soleil observant la scène dans un ciel d'un azur pur reflétait ses rayons sur les flocons en suspension, l'aveuglant pour quelques instants. Dès qu'il le put, il tira à nouveau sa baguette en prononçant d'un ton désormais plus colérique :
-Confringo ! en prenant soin de baisser la puissance du dangereux Sort.
Le rideau glacé qui entourait Arthur vola en éclats dans de belles gerbes cristallisées, la neige retombant tout autour de lui sur plusieurs mètres en occultant légèrement sa vision. Il n'y avait cependant plus personne devant lui, la jeune fille suivant les traces de ses amis malgré la marche difficile dans cette épaisse couche de neige. Déterminé à s'expliquer, il joua son atout le plus précieux : posant à terre sa bourse en peau de Moke, il détacha ses cordons écarlates en l'ouvrant grande, avant de sortir de celle-ci son fier Nimbus 2000, balai de dernière génération qu'il avait reçu pour Noël. Il l'enfourcha prestement, et le bolide se mit presque instantanément à la poursuite des fuyards désormais proches de l'entrée du château, les rattrapant en quelques secondes. S'arrêtant brusquement devant le Serdaigle et son ami Poufsouffle, il fit glisser sa baguette dans sa main d'un geste rapide, avant de la pointer vers eux :
-Immobulus ! en visant uniquement les jambes d'Elliot afin de ne pas totalement l'immobiliser, dessinant dans les airs un signe ressemblant étrangement à un pic montagneux brillant d'un éclat violet.
Les pieds transis de froid, Elliot continuait sa 'course de repli' dans la poudreuse en compagnie d'Evan. Il vérifiait derrière de temps à autre et put constater, appréciateur, qu'Alice s'en était plutôt bien tirée. Elle avait retardé l'ennemi et les rejoignait maintenant en trombe. Sa stratégie fonctionnait, mais ils n'étaient pas encore sortis d'affaire. Les portes du chateau se rapprochaient lentement, trop lentement. Derrière, Elwent avait sorti un petit sac et fouillait dedans, laissant croire un instant à Elliot qu'il avait abandonné la chasse.
Mais quand il vit que son camarade de maison sortait en fait un balai, Elliot comprit que c'était tout l'inverse. Il ouvrit grand les yeux et laissa échapper un "Ohhh non. Non non non !" A Evan : "Plus vite !" A Alice : "Plus vite !" Il se doutait bien que c'était peine perdue mais quelque chose le poussait à continuer quand même. Jusqu'à ce qu'Arthur se retrouve devant eux, juché sur son fier destrier, bloquant leur accès au château. Là, c'était mort.
Elliot déglutit entre deux respirations hâchées. Son aîné avait l'air très fâché pour une raison qui lui échappait. La fuite étant devenue impossible, il ne restait qu'une solution : la négociation. Le jeune poufsouffle essouflé fit un pas en avant et leva les mains en l'air en signe de reddition : "Attends Elwent. Arthur, Art..."
-Immobulus !
Sa bouche resta en forme de o stupéfait, ses yeux grands ouverts, ses mains levées avec les doigts écartés. Comme il n'était pas en parfait équilibre sur ses deux pieds, il se sentit plonger très lentement en avant. Et il ne pouvait rien y faire. Seuls ses pupilles noires et ses iris bleus s'animaient encore, visiblement paniqués.
La situation avait pris une tournure pour le moins innatendue. Des trois élèves qui sortaient prendre l'air, il ne restait pas grand chose. En effet, un plus vieux avait prit sur lui de déclarer une guerre entre eux pour des raisons qui échappaient à Evan. Tout d'abord il avait reçu une boule, ce qui n'avait pas aidé sa capacité de penser, mais il en avait aussi reçu une deuxième alors qu'il tentait de calmer la situation.
Tombé tête première dans la neige, le postérieur gelé et trempé vers le ciel, quelqu'un prit sur lui de le prendre par l'épaule et de l'aider à fuir ce qui semblait être ni plus ni moins un combat. Tentant de se mettre en sureté, les deux camarades d'Evan avaient tentés des sorts de protection qui fonctionnait mais restaient éphémères.
Le jeune Evan courait sans penser à rien, tentant de ne pas se prendre les jambes dans sa cape mouillée comme pas deux, tentant d'ignorer ses lunettes et son nez cassés. Il se laissait aller à espérer que tout ceci ne soit qu'un simple rêve, un cauchemar qui ne tarderait pas de s'arrêter; mais il se trompait.
Alors qu'il voyait la porte approcher, il vit Arthur apparaître devant eux sur son balai au même rythme qu'il avait vu son salut disparaître. Avant même qu'il ne puisse lever une main pour tenter - encore une fois - de calmer la situation, le poufsouffle apparemment dénommé Arthur, avait déjà sa baguette en main et avait immobilisé son camarade qui était tombé dans la neige. La situation prenait un tour dramatique. S'il restait là plus de dix minutes, c'était l'hypothermie qui devenait sa principale ennemie.
Il s'interposa comme il le pût entre les deux hommes et s'essuya le sang qui coulait de son nez, tentant de voir l'ennemi qu'ils avaient en face:
- Jeu grois gu'il faut se galmer, mais gu'est-ce gui de prend?
La baguette d'Arthur fut illuminée d'un éclair mauve, envoyé à bout portant sur les jambes du pauvre Elliot qui lui faisait face, se figeant dans un rictus étonné alors que ses yeux roulaient désespérément. Il n'était pas fier d'avoir utilisé un sort contre la future génération de Sorciers, mais il voulait éviter leur fuite afin que la situation ne soit mal comprise par un membre de l'Ecole et que cela ne se change en punition disciplinaire, chose qu'Arthur concevait à raison comme difficilement agréable pour lui.
Il jeta ensuite un œil au Serdaigle apeuré qui s'était interposé entre lui et son jeune camarade après que le sort fut lancé. Du sang coulait de son nez, lui même légèrement tuméfié, après avoir reçu par deux fois une boule de neige en pleine face. Arthur était sincèrement désolé de s'être accidentellement acharné sur le jeune Aigle, ayant mal géré la trajectoire de sa première attaque. Tentant de faire un sourire qu'il voulait rassurant, celui ci dirigea cette fois sa baguette blanche vers son visage, avant de doucement prononcer :
- Episkey.
Arthur se pencha ensuite sur l'objet de son sort de soin, appréciant son travail parfaitement accompli. Le sang avait instantanément arrêté de couler, et le bleu qui commençait à se former sur sa joue se résorbait rapidement. Le Serdaigle n'aurait plus qu'a essuyer les tâches de sang de son visage, et tout serait de retour à la normale, comme si rien ne s'était passé ! La jeune fille l'ayant attaqué était un peu derrière, ayant rejoint ses camardes peu avant sa fulgurante arrivée.
Un événement inattendu vint cependant perturber l'heureuse fin de cet incident qu'Arthur croyait sans suites. Avançant bruyamment dans l'épaisse couche de neige, une jeune fille à l'air mécontent se dirigeait rapidement vers le Poufsouffle, appréciant manifestement peu cette agitation. Il prit quelques instants pour l'observer avec plus d'attention tandis qu'elle allait se poser devant lui : plus petite que lui, de longs cheveux d'une couleur châtaigne tombaient sur sa lourde cape noire, celle ci étant ce que redoutait le jeune homme. Sur son buste était arboré une petite insigne verte, sur lequel un P argenté brillait. Il allait devoir faire un choix : fuir de façon efficace ou trouver une explication qui convaincrait la Préfète de Serpentard. Il fut cependant coupé dans sa réflexion par la jeune fille qui l'interpella bruyamment :
-On fait comment ? Je t'emmènes directement voir Chourave ou je t'expliques point par point pourquoi t'es plutôt mal ? fit la Préfète d'un air suffisamment hostile pour que le Poufsouffle ressente clairement la menace qui pesait désormais sur lui.
Cependant déterminé à sortir indemne de toute cette histoire, Arthur ne se défila pas, claironnant en tenant fermement son Nimbus 2000 dans la main, prêt à une fuite improvisée :
-J'imagine que la vérité ne marchera pas ? en serrant les dents.
Alice courait à en perdre haleine, voyant les portes de château se rapprocher de plus en plus. Ils arriveraient peut-être avant leur agresseur! Cette pensée rassura Alice, qui voyait des taches vermeilles qui souillaient la blancheur environnante, provenant vraisemblablement du nez d’Evan. C’est alors que quelque chose passa tellement vite près d’elle que ses cheveux bruns volèrent au vent. Après quelques secondes, elle compris qu’Elwent avait enfourché son balai pour les rattraper.
*Ho non! Maintenant, c’est peine perdue!* Pensa-t-elle en courrant toujours le plus vite qu’elle pouvait, afin de seconder ses amis qui n’étaient plus qu’à quelques mètre d’elle.
La jeune fille entendit péniblement le cinquième année dire un « Immobolus » étouffé par l’épaisse couche de neige recouvrant le paysage et par le sifflement qui résonnait dans ses oreilles. Son souffle rauque couvrait les voix qui s’élevait de l’attroupement.
- Jeu grois gu'il faut se galmer, mais gu'est-ce gui de prends? Articula difficilement Evan, le nez visiblement cassé.
Heureusement, Elwent répara ce dernier d’un rapide sort de soin, soulageant la jeune Serpentard. C’est alors qu’elle aperçut Elliot, pétrifié, flottant au dessus du sol. À la fois choquée du geste, intriguée de l’acharnement du grand brun et essoufflée de sa course effrénée, les yeux d’Alice voyageaient entre les deux jaunes et noirs. C’est alors qu’elle aperçut une préfète de sa maison, Violette Aticus, ou quelque chose du genre, s’approcher et prendre la parole :
- On fait comment ? Je t’emmène directement voir Chourave ou je t'explique point par point pourquoi t'es plutôt mal ? Lança-t-elle, visiblement ennuyée de la situation.
Sortant de sa torpeur, Alice se précipita auprès d’Elliot pour le remettre sur pieds tant bien que mal vu sa lévitation, toujours pétrifié, pendant qu’Elwent lançait entre ses dents :
- J'imagine que la vérité ne marchera pas ?
Furieuse, la première année allait crier, mais se ravisa. L’autre Serpentard était une préfète, quand même, et Alice n’allait pas défier son autorité. Inquiète pour son ami, elle se risqua toute de même, tenant Elliot par le bras pour le maintenir à la verticale.
- Pourriez-vous vous occuper de lui, s’il vous plaît ?
Sa voix était calme et respectueuse, mais tout de même assurée. Elle avait envie de tout raconter aux autorités compétentes, afin que justice soit faite et que cet arrogant jeune homme reçoive une punition appropriée, mais libérer son ami de ce sort d’immobilité était plus urgent.