"Pardonne l'absence d'un "bonjour", "merci" et "au revoir" dans cette lettre, car, je ne vais pas passer par quatre chemins. J'ai besoin de tes talents, là, maintenant, tout de suite. Tu es d'une grande érudition lorsqu'il est question de marier coup bas et potions et j'aurai comme qui dirait grand besoin de calmer les ardeurs de quelqu'un. Je t'en dirais plus dans une dizaine de minutes. À l'heure où tu lis ceci, je suis sans doute au seuil de ta porte."

 Voilà ce qui était écrit sur la missive que tenait Adélaïde, le tout signé par son amie Alienor. Tout en lisant, elle ne pu s'empêcher de sourire ; elle la retrouvait bien dans ces quelques mots. En effet, la jeune femme avait pour habitude d'être assez précipitée plutôt que de réfléchir longuement sur un problème, chose qui se ressentait. Une hâte certaine ressortait de sa lettre, ainsi que les quelques flatteries dont elle usait bien souvent pour parvenir à ses fins.

 Dans quoi s'était-elle encore fourrée ? La miss Nott était de nature curieuse, et n'avait nullement envie d'attendre pour avoir plus de détail. Pour son plus grand plaisir, elle n'eut pas à le faire, la blondinette entrant brusquement dans sa boutique avant même qu'elle n'eut le temps de reposer le papier.

 "- Adélaïde ! S'exclama la Greengrass, comme si celle qu'elle interpellée avait pu rater sa venue.

 Cette dernière, donc, se contenta d'hausser un sourcil pour l'inciter à directement lui livrer son récit. Aucune politesse inutile entre elles, les banalités n'avaient que peu lieu d'être dans leurs discussions si elles avaient un sujet plus important à aborder.

 Avisant de l'enveloppe posée sur le bureau, la styliste parut satisfaite. Sûrement se disait-elle qu'elle n'aurait pas besoin de préambule pour s'expliquer, ce qui arrangeait bien sa cadette. Celle-ci voulait savoir, et maintenant. Peut importe de qui, peut importe de quoi, elle aimait aider ses amis à se venger. Le fait que cela soir mérité ou non n'était qu'un détail à ne pas prendre en compte. Elle avait eu le temps d'élaborer quelques hypothèses, et devait départager le vrai du faux. Avec Alienor, elle devait pouvoir s'attendre à tout.

 - Je vois que tu as lu la lettre que je t'ai envoyée. Voilà qui est parfait ! Commença-t-elle en s'approchant. J'ai besoin de ton aide. Ou plutôt de tes merveilleuses idées en l'art de se montrer cruellement clair, net et précis. J'ai besoin de faire passer à quelqu'un l'envie de jouer aux racoleurs avec tu te doutes de qui.

 Cela concernait forcément Em. Il s'agissait de l'ex d'Alienor, une personne à qui, quoi qu'elle en dise, elle restait fortement attachée. Elle pouvait jouer à faire celle qui se contentait de faire jouer ses droits de possessivité pour justifier une certaine jalousie, mais pour ceux qui le connaissait vraiment, le fait qu'elle tienne encore à elle était limpide. Ce n'était qu'une question de temps avant que la situation ne s'éclaircisse.

 - Et je ne demande pas ton avis sur le fait que je me sentes "encore" concernée par sa vie. Là n'est pas le problème.

 La brunette ne put s'empêcher un sourire, tout en s'adossant à une étagère qui se trouvait derrière elle, s'écartant légèrement. Observant la manucure parfaite de ses ongles, elle ouvrit la bouche.

 - Bien sûr, ce n'est que parce que tu ne la supportes absolument plus que tu essai de faire le ménage autour d'elle, et pas parce que cela t'es insupportable de voir qu'elle peut être proche d'autres personnes. Je le sais bien, je n'ai jamais eu la moindre intention d'insinuer le contraire.

 Elle lança un regard ironique à son interlocutrice avant de reprendre.

 - Sinon, il me faudrait un peu plus d'informations sur celle qui tu ne considère pas le moins du monde comme une rivale. Tu as un nom ? Une photo ? Une adresse ? Ou on va devoirs enquêter sur son identité ?"

 Méthodique, elle était consciente qu'il fallait tout d'abord commencer par les fondements pour réussir à correctement punir quelqu'un. Elle aimait frapper là ou ça faisait mal, vraiment, et était plutôt douée grâce à son don d'observation. Et également un certain sadisme.
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Ce qui était amusant, c'était qu'entre les deux amies, la cadette se comportait comme l’aînée et l’aînée comme la cadette.En effet, si elles avaient toutes les deux le même besoin d'être admirées, cela se ressentait de manière tout aussi subtil chez Adélaïde qu'outrageusement chez Alienor. Cette dernière avait parfois des manières enfantines et une certaine tendance à agir comme si elle était une comédienne qui jouait en permanence des scènes toutes plus farfelues les unes que les autres. Elle avait besoin de l’attention des autres, qu'on la considère et ait besoin d'elle. Cela se ressentait jusque dans ses propos. Consciente jusqu'à un certain point de cela, l'alchimiste se contentait de sourire à ses piètreries sans pour autant toujours reprendre ses propos.

Tempérant sa représentation, elle se réintéressa au sujet initial.

"- Je crains, hélas, que les maigres informations que j'ai ne suffisent pas à identifier clairement la personne. Pour tout dire, je ne saurai même pas dire si cette... Fille. Restons courtoises. Est, ou non, de notre statut social. Elle a toujours été plus "tolérante" au sang coulant dans les veines de son entourage. Bien qu'elle n'en irait pas jusqu'à faire sa vie avec un sorcier ou une sorcière issu du monde des petites gens. Après... L'identification pure et dure est-elle vraiment nécessaire ? Je saurai la reconnaître dès lors où mes beaux yeux bleus se poseront sur son disgracieux visage. Cela dit... Il est vrai qu'il serait mal me connaître si l'on venait à dire ou penser que je ne suis pas assez fouineuse pour entrer dans la peau d'un paparazzi l'histoire d'un flagrant délit immortalisé en photo. C'est assez flou, mais, suffisant, je suppose. J'espère que tu ne connais, ni n'es proche, de la cible. Car, tu sais pertinemment qu'avec ou sans ton soutien, elle passera ce que l'on appelle communément un sale quart d'heure.

La brunette haussa les sourcils, avec un froncement de nez.

- Et dire que pendant ce temps, tu pourrais te trouver un charmant sang-pur qui ferait le bonheur de ta famille ...

Elle eut un long soupir. Un jour, il faudrait bien que la blondinette se détache de son ancienne amante. Plissant le nez, elle s'approcha de la photographie que sa compagne avait avancé jusqu'à son visage. Celui-ci lui était vaguement familier, mais elle ne parvenait pas à le resituer. La qualité déplorable de l'image n'aidait pas.

- Tant qu'à espionner les gens, tu aurais pu t'appliquer, reprocha-t-elle sans méchanceté.

Cherchant dans ses souvenirs les plus lointain, elle se concentrait pour essayer de la resituer. Elle ferma les yeux pour puiser comme elle le pouvait en ses pensées. Soudain, une illumination se fit en son esprit. Son visage s’éclaira.

- Je ne sais pas qui elle est, mais ...

Elle marqua une pause théâtrale se délectant des réactions de son amie.

- Je sais où elle habite ! Et c'est assez facile de s'y rendre."

Lors d'une soirée chez l'une de ses connaissances, elle avait entraperçue l'inconnue entrer dans une maison mitoyenne, et on lui avait confié qu'elle était l'une des voisines.

Le squelette d'un plan commençait à prendre place en son esprit.
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Suite à sa première remarque, la jeune blonde était partie dans une tyrade interminable, qu'Adélaïde n'avait même pas écouté. Elle avait préféré s'occuper d'analyser la photo et refléchir à la vengance futur.

"- Tu sais que je t'aime, toi ? Dis moi... Qu'as-tu de beau à me proposer ? Des ingrédients irritants ? Urticants ? Brûlants ? Que sais-je encore ! L'avait interrogé Alienor.

Si la Nott avait commencé par sourire à l'élan affectif de son amie, elle avait sourcillé quant à la suite de ses propos. Elle voulait se contenter d'une vulgaire potion ? Sans origine ni justification ? Décidément, elle avait bien fait de venir voir l'alchimiste, qui, elle, était moins dans la précipitation. Elle replaça une mèche derrière son oreille en soupirant.

- Enfin Ali ... Il faut que nous jouions plus intelligemment. Tu ne veux pas te contenter de la punir, mais qu'elle ne s'approche plus d'Em, n'est-ce pas ? Ok, alors il faut qu'on réfléchisse. On va lui faire passer un message, "pas touche". Et pour ça, il faut viser juste, et précis.

Restait à savoir comment. Observant méticuleusement le plafond, elle était en pleine réflexion. Il était haut et vieilli par le temps, parsemé de poutres aux épaisseurs et teintes assez approximatives. De nombreux nœuds habillaient le bois. Elle se perdait dans sa contemplation, mais fini tout de même par trouver une idée qui lui convenait pleinement.

- Et si on allait lui rendre une petite visite ? Elle pourrait malencontreusement se trouver chez l'une de ses voisines, pendant que nous, on ferait un peu de ménage chez elle ...
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