Petit texte sur le cycle de la vie
Quelque part au milieu d'un dédale de rues grises et sans vie, ici ou là-bas, sous la pluie de novembre, deux jeunes amants se sont installés. Ils n’ont pas d’immense villa, juste un petit appartement miteux ; mais qu’importe ils sont heureux. Les projets et les songes rythment leur quotidien. On est en 2013. Eliana aimerait devenir écrivaine et Joe basketteur professionnel. Ils attendent que quelqu’un les remarque.
Personne ne les a jamais remarqué.
On retrouve le jeune couple un peu plus vieux de deux ans maintenant. L’argent manque, les factures sont toujours plus lourdes. Leur amour s’est progressivement transformé en haine mutuelle. Ils s’aiment, évidemment, mais est-ce suffisant ? Ils se disputent, s’insultent, se battent. Ils cèdent à leurs démons les plus incontrôlables, des forces toutes plus horribles les unes que les autres. Tout comme leur amour, les projets ont changé. Eliana est devenue vendeuse d’un magasin de vêtements et compte bien monter les échelons de cette profession. Joe, quant à lui, s’engage dans l’armée.
Ils s’éloignent, se brisent, se séparent.
Un certain jour de novembre, au milieu de son lit vide, Eliana se remémore sa relation passée. Et si elle n’avait pas agit comme tel, peut-être ne serait-il pas parti ? Elle sait qu’il n’y aura pas d’autre chance, cette fois; il ne reviendra pas. Mais c’est plus fort qu’elle, elle adore cela ; se faire du mal. Elle a beau se demander ce qu’il fait, s’il est encore vivant ? Personne ne lui donnera de réponse. Elle est seule.
Joe, lui, a refait sa vie avec une jeune Afghane. Elle a tout pour plaire mais ne remplacera jamais son premier amour. Il continue à respirer sans être heureux. Une vie malheureuse vaut-elle mieux que la mort ? Il se plonge dans son travail, monte en grade et ne rentre presque plus voir son Afghane.
La mort vaut-elle mieux qu’une vie malheureuse ?
Un an s’écoule. Eliana s’est éprise d’un jeune dealer de vingt ans, son cadet. Les mauvaises décisions entraînent d’autres mauvais choix. Elle a quitté son travail, a renoué avec les drogues dures. Elle n’est plus que l’ombre d’elle-même. Est-elle amoureuse de lui ou des drogues qu’il lui procure ? Ce sont des questions qui resteront à jamais sans réponse. L’ancienne écrivaine est malheureuse, telle qu’elle ne se contrôle plus. De l’alcool. Un rail, deux, trois et une overdose en perspective.
Spasmes des morts dans l’oubli des nuit-tombes. Les obus cognent. Exhument les repos intranquilles. Ce n’est pas tant cette présence qui le surprend. C’est ce visage, qu’il connaît, sans reconnaître. Un taliban. Une balle et c’est la fin. Il n’a pas le temps de réagir, il tombe juste.
Aujourd’hui, ils se sont retrouvés quelque part au milieu d'un dédale de rues grises et sans vie, ici ou là-bas, sous la pluie de novembre. Ils n’ont pas d’immense maison; mais qu’importe ils sont heureux. Les projets et les songes rythment leur quotidien.
C’est le cycle de la vie.
CODAGE PAR AMIANTE