Santa,

Autrefois, je me serais excusée pour le retard de ma lettre. Une lettre que, ce mois-ci, j'ai longuement hésité à t'envoyer. Autrefois, c'était l'époque où je désobéissais à Mère en t'écrivant: elle n'y voyait que des enfantillages. Mais je préférais prendre le risque d'une réprimande plutôt que de négliger notre correspondance. Tu ne répondais jamais, mais j'étais sûre que tu lisais mes couriers avec attention. Autrefois, je rêvais de te rencontrer, mais aujourd'hui ce rêve est en miettes.

Tu dois te demander pourquoi une telle différence de ton avec la dernière lettre que je t'ai envoyée. (Oui, parce que je ne me suis jamais contentée de ne t'écrire qu'au mois de Décembre, je voulais que tu saches que je ne t'oubliais pas, et je mettais un point d'honneur à t'envoyer des hiboux tous les mois.) Cette année aussi je voulais t'écrire, et j'ai même commencé une lettre pour toi, mais après ce que j'ai appris, je n'arrivais plus à la finir.

Au début, j'ai pris ça pour de simples rumeurs. Que tu aurais, soi-disant, élargi ta distribution de cadeaux aux enfants Né-Moldus, et ce depuis bien longtemps. J'étais outrée qu'on puisse répandre de tels mensonges sur toi, le grand Père Noël que j'aimais, et j'ai préféré les ignorer. Mais à force d'entendre constamment parler de toi par les Sangs-Mélés et même Né-Moldus (!), j'ai fini par être troublée.

J'avais honte de douter de toi, mais je devais en avoir le coeur net. Tu imagines bien que je ne touche jamais aux livres consacrés aux moldus; il y en a quelques uns à la bibliothèque de Poudlard. Ça n'est pas mon monde, ça ne m'intéresse absolument pas. Pourtant je me suis fait violence et j'ai découvert l'impensable vérité... Tu apparais dans tant de leurs "écrits", tu es le personnage de tant de leurs "contes" folkloriques... Sans compter tous ces Né-Moldus qui parlaient de t'écrire. J'ai dû me rendre à l'évidence: c'est impossible que tu ne leur sois qu'une vague légende (ces imbéciles transforment en "légende" tout ce qu'ils ne sont pas capable d'expliquer). Tu es une réalité pour eux, tu leur dispenses les mêmes bienfaits qu'à nous.

Tu nous a trahis. Tu fais partie de tous ces renégats qui font honte à leur sang. Tu les as laissé dénaturer ton histoire et utiliser tes pouvoirs à des fins vulgaires. J'ai honte d'avoir eu une telle affection pour toi.

Je t'admirais tellement Santa. J'ai été tellement déçue que j'ai pleuré une bonne partie de la journée. J'ai l'impression qu'on m'a arraché un bout du coeur.

J'inclus dans mon courrier la lettre que j'avais commencée à rédiger, dernier vestige de ma tendresse pour toi. Je doute pouvoir un jour te pardonner, du moins, pas sans explication de ta part, mais ma liste de souhaits y est écrite. Si tu veux me prouver que tu ne t'es pas détourné des tiens, du monde Sorcier qui t'a vu naître et t'a tellement chéri, tu sais ce qu'il te reste à faire.

Finalement, je vais juste te joindre ma liste. Je préfère brûler le reste.

-Une cape d'invisibilité
-Une plume à papote
-Deux-trois pots d'achillée sternutatoire
-Des graines de dictame
-Une puffapod
-Un nouvel échiquier de Sorciers
-Un rouleau de tissu noir, celui utilisé par Mme Guipure pour confectionner les uniformes. Ainsi que le tissu vert aux couleurs de Serpentard. Deux mètres suffiront pour celui-là.


Anciennement ta dévouée,
Rosalind Fawley


PS: Je voulais t'envoyer un poême cette année, pour te témoigner ma reconnaissance, mais mon inspiration s'est tarie, tout comme ma confiance en toi.

PS 2:

(Finalement.)